Essai. L’Afrique bouscule l’universel

Philosophie, anthrolopologie : le continent suscite les polémiques. « En quête d’Afrique(s) », livre de débat entre les intellectuels Souleymane Bachir Diagne et Jean-Loup Amselle, en témoigne.
Philosophie, anthrolopologie : le continent suscite les polémiques. « En quête d’Afrique(s) », livre de débat entre les intellectuels Souleymane Bachir Diagne et Jean-Loup Amselle, en témoigne.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que Souleymane Bachir Diagne et Jean-Loup Amselle ne sont pas d’accord. Engageant une discussion sur « universalisme et pensée décoloniale », le philosophe sénégalais et l’anthropologue français passent en revue les grands thèmes à propos desquels les auteurs postcoloniaux ont montré les limites de la pensée occidentale, quand elle ne remet pas en question son héritage colonial.

En quête d’Afrique(s) est construit en chapitres rédigés tour à tour par le philosophe et l’anthropologue, chacun abordant une problématique commune ­ (spécificité culturelle, race et identité, langues africaines, islam…) sans toujours commenter frontalement ce que l’autre a écrit. Il se conclut par une confrontation directe sur certaines des questions qui sont apparues ces dernières années dans la société française, comme le racisme antiblanc, le communautarisme ou le privilège blanc.

En 2008, dans L’Occident décroché (Stock), ouvrage au vitriol, Jean-Loup Amselle, directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales, africaniste spécialiste du Mali dont les travaux portent notamment sur le métissage, l’ethnicité, l’islam et le multiculturalisme, suspectait la philosophie de Souleymane Bachir Diagne de n’être qu’« une forme réfractée de fondamentalisme musulman » ou « une sorte d’afrocentrisme orientalisé ». Rien de moins.

Partir du pluriel

Résultat, dix ans après, le débat est vif et tourne souvent au dialogue de sourds. Souleymane Bachir Diagne, professeur à l’université Columbia, à New York, dont il dirige l’Institut d’études africaines, ne répond pas toujours aux objections de Jean-Loup Amselle, estimant que ce dernier s’adresse...