Afrique du Sud. Une greffe de pénis pour redevenir un homme

À cause de circoncisions traditionnelles ratées, l’Afrique du Sud enregistre le plus fort taux d’amputations du pénis. Pour répondre à ce fléau, le pays est devenu pionnier dans la greffe de ce membre.
À cause de circoncisions traditionnelles ratées, l’Afrique du Sud enregistre le plus fort taux d’amputations du pénis. Pour répondre à ce fléau, le pays est devenu pionnier dans la greffe de ce membre.

Si les greffes font peser presque toujours une pression terrible sur les épaules des chirurgiens et que les conditions ne sont jamais idéales, celle-ci était encore plus stressante que d’habitude pour les quatre médecins concernés.

La première difficulté venait du donneur, un jeune homme de 21 ans qui avait été admis en avril à l’hôpital de Tygerberg, au Cap, en Afrique du Sud, pour une crise d’asthme aiguë qui l’a laissé en état de mort cérébrale. Sa famille a accepté de mettre son pénis à disposition des médecins pour une greffe – une opération qui n’avait été tentée jusque-là qu’à deux reprises (mais avec succès) : à Boston en 2016 et ici même, à Tygerberg, où des médecins ont réalisé la première greffe de pénis réussie en 2014.

Mais, comme souvent dans ce type de cas, la famille du donneur a tergiversé pendant plusieurs heures, donnant dans un premier temps son feu vert au prélèvement avant de se rétracter. C’est une chose de donner les organes invisibles d’un proche (la famille avait déjà accepté de donner ses reins), c’en est une autre de faire don d’un appendice visible comme la main ou le pénis, altérant ainsi pour toujours le corps du défunt dans son souvenir. Cinq heures plus tard, la famille rechangeait d’avis. La greffe aurait donc bien lieu – l’équipe médicale s’est aussitôt empressée de relancer toute la logistique nécessaire à une opération d’une telle complexité.

“Entre-temps, l’état du patient était devenu si instable que son cœur était à deux doigts de s’arrêter”, se souvient André van der Merwe, le chirurgien-chef pilotant l’intervention. S’il cessait de battre pour de bon, le cœur du patient n’enverrait plus de sang dans les organes, entraînant leur mort et annulant tout espoir de greffe.

Peu avant minuit, deux équipes de chirurgiens se sont mises au travail. L’une s’est employée à prélever les reins tandis que l’autre récupérait le pénis (les organes étaient destinés à des receveurs distincts). Le temps était compté du fait de la pression artérielle déclinante du patient, et André van der Merwe a dû sectionner les vaisseaux beaucoup plus près de l’extrémité du pénis que ce qu’il aurait souhaité, ce qui allait poser de sérieux problèmes par la suite. [...]